Justine, lectrice de base de science-fiction, commente l'actualité du milieu. N'hésitez pas à m'envoyer des potins du milieu à justine.sene (à) voila.fr

26 novembre 2006

Oxymore, no future!

Je ne peux que m'émerveiller à la lecture du magnifique article de Léa Silhol sur la fin de l'Oxymore, disponible ici sur actuSF.

Je reviens sur le fond plus bas, mais déjà la forme est superbe: "revendiquons une attitude punk et prouvons le", semble dire ce texte. J'imagine la réunion préparatoire à la rédaction du texte:

- on va citer un rebelle au début et à la fin. Pour le début, Nine inch nail. Le chanteur dit des gros mots dans ses chansons et est pote avec Marylin Manson, donc ca fera l'affaire. Pour la fin, heu, on pourrait remettre Nine inch Nail, de toute facon on y comprend pas grand chose mais ca fait vachement paroles révoltées.

Argh, NIN. Le mec qui a créé le son de Marylin Manson et qui a fait les magazines people pour ses relations avec Courtney Love. Moins punk que ca, il ne doit y avoir que Plastic Bertrand. C'était pourtant pas dur de piocher dans les Dead Kennedys, non ?

- si on mettait de l'anglais dans le texte ? Le punk c'est anglais, non ? Surtout pour les intertitres, c'est pas grave si les lecteurs comprennent pas. Et pis un "so" ou un "yes", ca mange pas de pain.

Ah là, une petite défaillance, il aurait fallu ajouter un "by the way", ou mieux BTW, pour avoir l'air vraiment à cheval entre la france et Londres. Et gros oubli: avoir écrit "la spirale infernale" alors que NIN a fait un "downward spiral", c'est comme rater un mot compte triple au scrabble.

- et surtout, disons le qu'on est punk. Tiens, j'ai un argument béton: "Et comme tous les Punks, bien sûr, on avait gravement raison".

Ouah. Avec un raisonnement pareil, on peut se permettre que le reste du texte soit totalement bancal et illogique. Car le fond, venons-y, c'est deux parties totalement contradictoires:

1/ on est des punks, on nique le système et on fait ce qu'on veut. L'important, c'est pas de vendre, c'est d'éditer ce qu'on aime. En fait, on est tellement rebelz, que si le système nous rattrape, mieux vaut se saborder ("Mais à partir du moment où les concessions à la machinerie du commerce se faisaient plus importantes que le plaisir pur de la création, les Punks (donc) que nous sommes ont commencé à se demander ‘à quoi bon ?’").


2/ Si on a coulé, c'est de la faute de tous le monde : les auteurs qui nous emmerdent en nous filant des textes qui correspondent pas à ce qu'on veut, les medias qui parlent pas de nous, les libraires qui pour de basses raisons matérielles mettent sur les rayons les livres qu'ils ont des chances de vendre, et surtout les lecteurs qui osent ne pas acheter nos livres.

Bref on est des rebelles, on emmerde le système et on se plaint parce que le système nous rejette. Ca méritait effectivement d'être dit.

Enfin bon, tout n'est pas perdu, on peut penser que ce texte sera reconnu à sa juste valeur lors des razzies de Bifrost.

Allez, sans rancune, après tout je n'ai acheté qu'un livre de l'Oxymore, donc je suis une lectrice molle du bulbe. C'est certainement pour ca que j'ai compris de travers ce texte.

05 novembre 2006

Utopiales 2006, cruelle déception!

Et oui, je suis de retour du festival de science-fiction que le monde entier nous envie.

Ou nous enviait ?

Car "on" voudrait tuer ce festival qu'on ne s'y prendrait pas mieux. En vrac:

- tout d'abord la date des Utopiales: mettre ca pendant les vacances scolaires, c'est vraiment une belle reconnaissance pour le travail pédagogique effectué l'an dernier et les dizaines de classes qui avaient fait le déplacement. Réussir à choisir le week-end ou le festival "quai des bulles" a lieu à saint-malo, provoquant ainsi la désertion des dessinateurs et des fans de BD qui créent d'habitude des files d'attente ininterrompues devant la librairie du festival relève du tour de force.

- un thème général repoussoir et incompréhensible (c'était quoi déjà ? La guerre froide ? l'utopie ? Socialisme ou Barbarie ?) .

- une communication faible voire inexistante, la liste des invités semblant quasiment secrète encore peu de semaines avant le festival; seule une fuite sur un forum web semble avoir déclenché la révélation de cette liste.

- une couverture presse ridicule par rapport aux années précédentes. Si Presse-ocean est encore dans la liste des partenaires, ils avaient visiblement décidé de faire le service minimum.

- une affiche hideuse et illisible, dont le seul point positif est sa quasi-absence dans les rues de Nantes, ce qui a peut-être évité de repousser plus de visiteurs (misère...)

- une sélection cinéma composée des chefs-d'oeuvre des pays de l'est des années 30 à 50, ce qui a certainement un grand pouvoir d'attraction sur la jeunesse nantaise. Il suffit de savoir que le plus gros succès a été la projection de "turkish star wars" pour comprendre le problème. (des mauvaises langues me diront que ca a toujours été ainsi, mais non, je me souviens avoir vu quelques films valables malgré tout les années précédentes).

- un site web dont le vide n'avait d'égal que la laideur. (bon, il était fait avec spip, j'espère au moins que l'auteur n'a pas osé facturer sa prestation qui semble se résumer à la création d'un bandeau).

- un faible nombre d'invités coté littérature avec un renouvellement encore plus faible. Quitte à ne pas voir grand monde, ca aurait été bien que ce ne soit pas les mêmes qu'aux six éditions précédentes. Et je ne laisserais pas parler ma sensibilité féministe pour déplorer le caractère unisexuel des invités, Catherine Dufour l'a fait mieux que moi lors de la remise du GPI.

- la disparition des cafés littéraires des années précédentes, qui permettaient des conférences/débats plus "intimes" (avoir pu écouter le regretté Jean-Pierre Hubert expliquer pourquoi il écrivait de la littérature jeunesse l'année dernière reste un de mes grands souvenirs)

- une réelle intuition dans les horaires des conférences: celles destinées au public jeune (notamment les deux excellentes game design) étaient situées entre 12 et 13 heures, à l'heure du repas.

- une pauvreté des expositions et des animations: 1 seul illustrateur visible (je ne sais pas ce qu'en pensait les gens d'art&fact, mais leur présence a rarement été aussi faible), 3 machines identiques s'agitant stupidement dans un coin entre les conférences, une expo certes interressantes sur les machines volantes mais ou on va passer difficilement plus d'une demi-heure (et encore, à condition de marcher lentement) . Finalement, la moitié de la surface d'exposition était tenu par des affiches de film de super-héros, prétexte à des explications pour le moins légères sur leurs talents, avec bien moins d'interets que l'expo sur les stupéfiants science-fictifs de l'année dernière. Quel intérêt de voir des affiches de films sortis pour la plupart dans les 5 dernières années ?

Bon, pour finir sur une note positive, une animation a quand même connu un grand succès: le match de chess-boxing. Beaucoup des spectateurs étaient certainement venus par curiosité et je ne me souviens pas avoir vu une autre soirée attirer autant de monde lors des utopiales précédentes. Malheureusement (faut bien qu'il y ait un mais), le lien avec la SF est pour le moins léger.

Quelle est la cause de la faible qualité de cette édition ? Je ne suis qu'une lectrice de SF de base, même pas nantaise, alors je ne me hasarderais pas à nommer des coupables. J'ai juste cru comprendre que l'équipe remplacant Patrick Gyger n'avait peut-etre pas eu beaucoup de temps pour préparer le festival (le fait que deux des animations (le chess-boxing et l'expo sur les voitures volantes) soient proposés par la maison d'ailleurs semble montrer que l'excellent directeur de la MdA a certainement du être sollicité dans l'urgence). J'ai aussi cru comprendre que le festival du rire organisé pour la première fois cette année à Nantes avait certainement plus mobilisé la cité des congrès.

Alors espérons que cette édition ne soit qu'une mauvaise passe du à un changement d'équipe qui ne se serait pas passé dans les meilleurs conditions et que tout ceci soit reglé pour l'édition 2008.
Car, soyons sérieux une minute, personne, aussi bien dans le milieu professionnel que dans le fandom n'a intérêt à ce que ce festival unique par ses moyens et son ampleur (au moins les éditions précédentes) disparaisse.

Reste à savoir si c'est aussi le cas des partenaires locaux.